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Bioluminescence.. Quand l’éclairage devient vivant

Exit les traditionnels réverbères : des organismes bioluminescents pourraient bientôt éclairer les rues.

La lumière grâce à un champignon            Organisme            1 spécimen Panellus            Lumière            Verte, 10 lumens (équivalent à une bougie), 24 h/24            Durée de vie            Plusieurs années, entre 10°C et 30°C

La lumière est produite par une enzyme naturelle du champignon, la luciférase, qui réagit avec l'oxygène de l'air.

L’éclairage représente 12 % de la consommation d’électricité en France.

Il comprend l’éclairage intérieur (25 points lumineux par ménage en moyenne, selon l’Ademe, soit 230 millions en tout) et l’éclairage extérieur (9 millions de points lumineux).

Les lampes à incandescence ont une efficacité de 9 à 15 lumens/watt, et les LED de 40 à 80 lm/W.

Quand, le soir venu l’obscurité s’étend, vers quelles sources se tourner pour éclairer nos intérieurs et nos villes juste ce qu’il faut ? (en limitant la pollution lumineuse et la consommation d’énergie)

A l’heure actuelle, les agglomérations misent sur les LED, peu gourmandes en énergie, et sur l’éclairage « intelligent », via des dispositifs à intensité variable, ajustant la quantité de lumière diffusée au gré des heures et de l’affluence.

Mais elles pourraient aller plus loin...

Envisager, carrément, de se passer d’électricité pour éclairer la nuit, en confiant la lumière urbaine à des organismes vivants.

Farfelu ? Détrompez-vous..

 « Les Indiens d’Amérique du Sud utilisaient déjà, il y a très longtemps, des insectes luminescents, des cucujos [une sorte de gros scarabée] , pour s’éclairer » , raconte Sandra Rey, l’une des pionnières françaises à travailler sur ce sujet, fondatrice de la start-up Glowee.

Les récits de l’historien espagnol Gonzalo Fernandez Oviedo rapportent que ces insectes, installés dans des cages, servaient de lampes d’intérieur.

Bioluminescence is the production and emission of light by a living ...

Mais alors… Pourquoi avoir attendu 6 siècles pour reprendre cette piste ?

C’est que la bioluminescence  est longtemps restée mystérieuse...

Que des insectes, bactéries ou champignons produisent de la lumière, le fait est répertorié de longue date et l’explication chimique est connue depuis 1887, grâce au physicien français Raphaël Dubois :

- à l’intérieur de certaines cellules ou directement dans la peau de certaines espèces vivantes,

une réaction entre une molécule (la luciférine) et une enzyme (la luciférase) en présence d’oxygène, provoque l’émission de photons, donc de lumière.

Mais côté biologie, les chercheurs séchaient...

Pourquoi certains organismes éclairent 24 h/24, et d’autres seulement dans l’obscurité ? Et Pourquoi l’intensité varie suivant les espèces ?

Puis, ces 20 dernières années, les mécanismes génétiques à l’œuvre dans cette bioluminescence ont été percés à jour, u point que l’idée d’utiliser des êtres vivants comme dispositifs d’éclairage à grande échelle, a commencé à être sérieusement envisagée.

A la clé : la possibilité de rendre bioluminescents des buissons, des haies, des arbres en bordure de route…

5個海洋奇觀,居然存在,一生難得一見 - 每日頭條

Féérique !

Encore fallait-il lever un dernier obstacle : les organismes étudiés n’éclairent pas suffisamment pour être utilisables, ou s’illuminent dans des conditions impossibles à reproduire. Et pour cause :

- la plupart des bioluminescentes sont marines et vivent dans les grandes profondeurs – plus de 80 % de la population des abysses est bioluminescente.

C’est cet obstacle que plusieurs équipes de recherche ont essayé de contourner, avec un atout décisif dans leur manche :

- la biologie de synthèse, qui permet de transférer la capacité d’émettre de la lumière d’une espèce à une autre.

Des chercheurs de l’université d’Etat de New York sont ainsi partis de plants de tabac ( Nicotiana tabacum puis Alata ), non bioluminescents à la base mais faciles à cultiver. Ils ont introduit dans leur chloroplaste « l’usine énergétique » des plantes – une séquence d’ADN venant de bactéries bioluminescentes marines.

UN ARBRE POUR LAMPADAIRE

Résultat ?

Les plantes obtenues se sont illuminées 24 h/24, de manière autonome et stable, pendant plusieurs mois. Mais pour l’heure, l’intensité de cet éclairage reste très modeste ...

- Tout juste une petite lueur visible dans le noir, l’équivalent de quelques lumens contre 400 lm pour une ampoule à incandescence de 40 watts !

Il n’empêche "le principe est au point" et Alexander Krichevsky à la tête de ces travaux, se montre très optimiste :

 « Nous sommes en train de progresser et d’obtenir des prototypes de plus en plus lumineux.

Je ne peux pas en dire plus pour l’instant, pour des raisons de confidentialité, mais je crois que d’ici 4 ou 5 ans nous devrions obtenir des plantes et même des arbres qui pourront éclairer nos rues ! Des défis techniques demeurent, mais aucun ne me semble insoluble. » 

MIT Just Created Living Plants That Glow Like A Lamp, And Could Grow ...

Dans la même logique, des chercheurs californiens -  autour de la start-up Glowing Plant ont tenté avec succès une expérience similaire avec une petite plante : Arabidopsis  et un gène de luciole.

Mais eux se montrent "prudents" sur l’intérêt de la bioluminescence pour remplacer l’éclairage extérieur.

 « Je ne pense pas qu’avant 10 ans nous puissions développer des plantes qui se substitueront à l’éclairage à grande échelle, parce que nos marges de progression sur la luminosité sont inconnues » , explique Antony Evans, fondateur de l’entreprise.

MAIS LA BIOLUMINESCENCE AURA BEL ET BIEN UN AVENIR COMMERCIAL :

 « Une autre piste paraît crédible à moyen terme. On pourrait utiliser ces plantes pour éclairer des lieux ou des intérieurs de manière permanente et non intense. » 

En clair :

Créer des veilleuses ou des éclairages d’appoint vivants. Cette approche motive également 2 équipes françaises, travaillant l’une sur des champignons et l’autre sur des bactéries bioluminescentes.

La première a testé, depuis 2011, diverses souches de champignons (60 espèces sont naturellement bioluminescentes), jusqu’à trouver l’espèce apte à éclairer autant qu’une bougie avec un seul spécimen.

Didier Blaha, chercheur en mycologie à l’université de Lyon et responsable de ce projet avec la designer Héléna Amalric, imagine déjà l’avenir : 

« D’ici quelques années, nos systèmes bioluminescents pourront produire une lumière écologique, sans aucune alimentation. Ce serait idéal pour réaliser un éclairage de transition là où il sera nécessaire de voir mais pas forcément d’éclairer à fond. »

Jargon

La bioluminescence (en grec, bios signifie « vie » et lumen , « lumière ») est un phénomène d’émission lumineuse qui se produit chez certains animaux (ver, luciole…), bactéries et champignons.

-  Ils n’ont pas besoin du soleil pour que cette réaction chimique s’opère, à la différence des organismes fluorescents et phosphorescents.

VOIR SANS ÉCLAIRER À FOND

La start-up française Glowee qui travaille elle, sur des bactéries génétiquement modifiées, suit le même raisonnement :

 « Avec la bioluminescence, on ne remplacera pas tous les lampadaires de rue car la puissance ne suffirait pas.

Mais, dans le futur, on pourra éclairer des vitrines, des abribus, des squares, des rampes, des passages piétons ou encore des panneaux signalétiques » ,

prédit Sandra Rey, qui a déjà réussi à développer une installation avec 70 adhésifs collés sur des murs et remplis de bactéries… permettant de voir dans une pièce plongée dans le noir.

Bien sûr, des progrès restent à faire pour augmenter notamment l’intensité, la durée de vie des « lampes vivantes », en trouvant le meilleur moyen de les « nourrir » facilement et durablement et d' étendre la palette des couleurs disponibles, aujourd’hui cantonnée au vert et au bleu.

Paris France Photo Photos Photography | Brian Jannsen PHOTOGRAPHY

L’idée suscite beaucoup d’enthousiasme chez les éclairagistes interrogés.

 « Cette démarche me paraît très novatrice car elle utilise une source naturelle » , reconnaît Marie-Pierre Alexandre de l’Association française de l’éclairage.

Or, le contexte actuel s’y prête plutôt bien, car rappelons-le  un arrêté restreint en France l’éclairage des bureaux, vitrines et commerces la nuit.

Nul doute que l’éclairage vivant, doux, limité, frugal, saurait s’y adapter.

Gif soucoupescience-et-vie.com

 

Date de dernière mise à jour : 2023-11-30